Concours de poésie

Veronica Grozova – Concours de Poésie – Français, Gr III

Veronica Grozova participe au Concours de Poésie du Festival 4 Arts, de Chișinău, République de Moldavie. Nous lui souhaitons beaucoup de succès et la remercions!

Elle a participé à deux catégories: roumaine et française.

La maison de mon âme

Entre ! Je veux te montrer les chambres de la maison de mon âme.
 Elles ne sont pas nombreuses, mais elles sont pleines…
Pleines de jours, pleines de souvenirs, pleines de pensées,
Pleines de soins et de voix,
De nos voix d’enfants et… de voix des parents et de nos grands- parents,
 Emportées vers le ciel par les vagues du temps.
Nous entrons !
Le Bonheur …
Les dimanches ensoleillés de mon enfance.
Nous, les enfants, nous nous réveillant dans des lits avec le linge propre,
 dans une maison toute propre !
Et les rayons passant par les vitres,
 et les colombes chantant sur le toit,
et les voix basses des parents,
Le bonheur d’autrefois !
Automne
Les poussettes avec nos enfants bébés sorties dans la cour,
Pour que les rayons du soleil automnal leur baise les joues.
Et leurs visages souriants pendant qu’ils dormaient,
Et les feuilles rouges partout
et le vent , qui doucement leur chantait.
Richesse
C’est maintenant que je sais que c’était une richesse,
Entre et bois toi aussi cette eau de sagesse !
Pour que tu comprennes vite,
Et plus vite que moi,
Il m’a fallu des années…
Entre! tu la verras !
C’étaient les soins, les soins de notre grand-mère,
Un immense travail, juste…juste comme un chantier !
Le pain frais crépitant sur la table de bois,
Les petits gais tapis arrangés comme d’soldats,
La belle cour souriant aux rayons du soleil
Et les mains soigneuses, ses nuits sans sommeil.
Printemps. Mars.
Neige, froid, les perce-neiges apportés du jardin pour toi !
Mais tes yeux les regardent pour la dernière fois.
Et tu pars, ma maman et me laisses en pleurant,
Et je ferme mes souvenirs pour longtemps, pour longtemps.
C’est tout. C’était la dernière chambre
Peut-être j’ajouterai encore,
Car la vie continue et j’ai déjà une nièce, une belle fille et un gendre.

Le silence

Imaginez-vous un coffre au milieu d’un chantier,
Et pour le remplir ramassez, donc, des pierres.
Jetez les dedans et de petites, et de grandes.
Cherchez quelques perles et y ajoutez !
Finissez le travail si le coffre est plein.
Reposez-vous, alors, on ne vous demande rien.
-Dites, c’est simple de les ramasser ?
-Les pierres ? Mais sans doute, elles sont partout entassées.
-Et des perles ? En avez-vous trouvées ?
- Mais c’est très difficile ! C’est du temps, de la santé !
-C’est comme ça que nous tous, nous jetons les paroles.
On n’entend, on ne pense, on n’écoute, on rigole.
On ne veut pas se taire et on jette des mots.
Et puis on regrette et repart à zéro.
-Et les perles, ici, quelle est leur importance ?
-Elles, elles sont les paroles, mais issues du silence !
Savez-vous, le silence est le fruit de la sagesse.
Ce n’est pas la fuite, c’est de la gentillesse !
Dans ce monde où les mots volent comme des papillons
On oublie de se taire, on n’entend pas les sons !
Nous mentons, nous jugeons,
nous donnons la naissance à un monde ignorant,
à des couples criant, à des fausses relations,
On ne pense plus à l’âme ! On ne pense plus à l’âme !
Je vous prie pour un jour de vous taire, de penser,
De ne vous dépêchez de parler, de crier.
Le silence, il est l’œuvre du cerveau et de l’âme,
Il’ faut se taire et parler si c’est très important.
Si celui qui t’écoute a besoin de tes mots,
Ne le fâchent, ne dérangent, sont utiles et profonds.
Le silence, il est plein de pensées et de paix,
Arrêtez-vous un peu, ne parlez pas, je sais
Que le monde, notre monde, devenu si bruyant
va changer, soyons raisonnables, patients ! 

La lettre

Ah, les jours d’enfance si gais dans la cour de la maison
Avec trois sœurs et quatre frères, avec l’éducatrice-cuillère,
Que maman sortait souvent de la poche du tablier,
Voulant « élevés » les faire,
Passaient vite et le cadet grandissait ne connaissant … les caresses de son père.
Il est mort, son père, soudain…
La cour devenue muette,
la mère devenue muette,
Deux épaules et milles soins,
Une jeune femme et huit enfants !
Elle pouvait perdre sa tête,
Mais elle fut une combattante, elle luttait en travaillant !
Le cadet avait comme tous ses devoirs à faire chaque jour,
Puis le déjeuner autour
 D’une petite table ronde
Et la grande cuillère au front si on n’était pas patient,
Huit enfants et leur maman, leur vie simple, leur vie dure !
Le cadet Etienne chassait des grenouilles, de petits poissons,
Et pour s’amuser l’jetait dans le puits de la maison.
La mère le grondait toujours : Tu les jettes dans la prison !
Et le temps, lui, vite passait,
Les enfants l’un après l’autre grandissaient et murissaient.
La nuit…le jeune Etienne est sorti rapidement,
Il allait à une rencontre, sa famille dormait doucement.
Des jeunes hommes de son village l’attendaient au coin de rue.
« Parlez plus bas, soyez prudents ! J’espère que personne ne nous a vus! »
Tous étaient trop agités, on parlait des soviétiques,
Arrivés dans leur village avec leur ordre,
Leur langage que personne ne connaissait.
« Qui sont-ils, les bolcheviques et pourquoi faut-il donner
Ce qu’on avait si dur gagné, nos vaches, chèvres, brebis, chevaux,
 Même les toits de nos maisons ?
 Qui leur a permis de faire ce qu’ils veulent chez nous, ici ?
 Mieux (puisqu’ ils)qu’ils partent dans leur Russie ! »
Se révoltant, disaient les jeunes.
 Et puis ils sont partis…sans savoir d’ la trahison !
Le matin, l’blâmé matin,
 Des voix, des cris, dans la petite cour
La maman, haussant d’épaules,
 Les bolcheviques méchants et durs!
Sa femme si jeune pleurait, priait,
Dans le berceau deux petits yeux noirs
Se sont ouverts et regardaient.
Et ne savaient que juste maintenant
Sans père restaient, sans aide restaient,
Et pour longtemps, pour trop longtemps !
Les jours passaient, les mois passaient,
Dix ans d’attente, dix ans de larmes,
Beaucoup de travail, peu de repos,
« Mon pauvre Etienne, mon pauvre enfant !
Je prie toujours pour toi le Dieu,
Puisqu’il te garde en Sibérie,
 J’t’attends toujours, mon malheureux,
Ta femme, ton fils t’attendent aussi ! »
Les cheveux tout blancs de notre mamie,
La cour toute pleine d’quatorze neveux,
La petite table, la cuillère,
 L’espoir vivant : « Encore un peu! »
Un jour une lettre est arrivée,
Une lettre venue de la prison.
Etienne, lui, il écrivait, son pauvre fils, son beau garçon !
Mais il avait une seule prière :
« Maman, j’vous prie laissez sortir, les petites grenouilles de notre puits
 Et n’oubliez les poissons, puisqu’ils soient libres, j’ai tout compris! »
La vielle femme prit, alors, le seau, les larmes coulaient sur son visage.
« Mon pauvre fils, mon cher, mon beau je t’attendrai, reviens, mon sage ! »