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Yasmine Aggoun participe à la section “Prose courte” du Concours International de Création Littéraire, 4ème édition, en provenance de Aubagne, France. Yasmine a 37 ans. Nous la remercions pour sa participation et lui souhaitons plein succès.

8 M Hier on nous célébrait, mes sœurs et moi. Hier le monde réveillé depuis quelques années de sa léthargie généralisée par l'alarme de notre sort, le mien et celui de mes sœurs violées ou harcelées par ces hommes qui jouent encore à touche-pipi ; le monde entier célébrait le 8 mars. Je vois mes sœurs bouquets et roses à la main, arborant un sourire de cinéma déambuler dans la rue. Elles sont à l'honneur ! Dans chaque main, de la pisseuse juvénile à la pisseuse incontinente, elles sont dans le rôle que ce Weinstein de monde a bien voulu leur donner. Hier était une journée comme une autre pour moi. J'ai parlé de moi et du sort de mes sœurs à un ami et il me rejoignait. Bel espoir. J'ai confié à un ami de longue date retrouvé à des milliers de kilomètres les anecdotes folles de ma drôle de vie, incluant viols et autres tentatives où je lui raconte comment par deux fois j'ai repoussé des hommes de deux fois ma taille, et politiquement Goliathesques. Je lui racontais comment chemise d'uniforme déchirée par mon violeur, boutons volants, j'ai demandé à ce qu'on appelle la sécurité puis la police le lendemain des faits. Mais ni l'une ni l'autre n'ont su "coroniser" ce politicien diplomatiquement immune et juridiquement inviolable. Je lui raconte aussi cette force inouïe, surhumaine, qui s'est emparée de moi pour me dégager de ses griffes : "Il y avait ma mère, ma grand-mère et mon arrière-grand-mère" lui disais-je. Comme si en moi toutes mes ancêtres, toutes les femmes de ma lignée étaient allongées de force sur cette table et le poussaient avec moi. Hier était un soir comme un autre où je me suis laissée vivre avec le peu de candeur qu'ils m'ont laissée, pour aller danser de toute ma féminité, me laisser draguer et prendre au jeu de la séduction. J'étais femme jusqu'au bout de mes hanches méditerranéennes moulées dans un beau pantalon de mon temps, moderne et émancipé. Mes sœurs ont toujours leurs bouquets et roses à la main, quand ce masculin dans une démarche de séduction me tire violemment les cheveux. Jaloux de ne pas avoir reçu de bouquet peut-être ? A quel moment, masculin t'ai-je autorisé à me tirer aussi violemment les cheveux ? Depuis quand est-ce que les jeux sexuels violents ont leur place sur une piste de danse ? As-tu déjà oublié que c'était ma journée ? Hier était une journée comme les autres où j'ai vu mon ami qui pourtant compatissait à mes incidents de viols, par homo-affectivité consoler mon agresseur qui lui avait l'air si ébahi de ma réaction, se demandant encore ce qu'il avait fait de mal. Hier était un jour normal où une sœur pisseuse juvénile rose à la main, me rappelait fièrement que nous n'avions pas le même âge. Et mes excuses en pleurs à la fille que je n'aurai jamais eue et que je n'aurai probablement jamais, de ne pas être capable de lui trouver un père à la hauteur. Parce que si même moi, avec toute cette force cumulée me retrouve dans ces moments en anémie émotionnelle face à ces "détails qui gâchent une soirée", alors je ne voudrais pas lui imposer ce monde. Ce monde ordinairement Weinsteinien. Ce film documentaire affligeant qui ne recevra jamais d'Oscar. Hier on nous célébrait mes sœurs et moi.
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